Les phéniciens
 
Le Pourpre Phénicien :
(La future couleur du ciel ? - L’aura - L’Immaculée conception…, ma deuxième toile…)

 

Les Romains, charmé par la couleur pourpre des Phéniciens, l’adoptèrent et en firent un symbole de dignité et de pouvoir. Effectivement, le jour de la célébration du triomphe d’un Imperator victorieux est la seule fois durant laquelle il pouvait porté la toge en pourpre et lui seule uniquement. Par ailleurs, pour les tuniques de la personne appartenant à l’ »ordo equester », seulement une étroite frange couleur pourpre était permise. Tandis que pour celles appartenant à l’ »ordo senatorius », une frange plus large les distinguait.
 
D’un autre côté, l’utilisation des ornements vestimentaires en pourpre était permise pour les prêtres, les consuls et les rhéteurs…
 
Le poète d’origine gauloise, Varrone Atacino, relate une certaine anecdote véridique concernant une petite villa près de Capoue. Cette dernière fut entièrement démolie par les autorités pour l’unique raison suivante : son propriétaire, un marchand récemment enrichi, se vantait d’avoir tapissé toutes les pièces de sa villa avec des précieuses toiles pourpres. Il a dû chèrement payer sa passion…
 
Giuseppe Santomaso, qui avait exposé au palais royal de Milan le tableau : « Le rouge aussi parle », affirme que charger le rouge symboliques ou psychologiques réduit l’efficacité chromatique qui est la puissance abstraite d’expression. Et toujours selon Santomaso : « Faire parler le rouge, et le rouge pourpre, cela veut dire… lui donner dans le tableau une fonction narrative, mais seulement par le rapport et la place avec les autres couleurs étalés sur la toile. ».
 
Il ajoute qu’à Venise, ils ont employé la couleur avec sa fonction intime, indépendamment des significations littéraires, véridiques ou pas. Puis il affirme que lorsque avec l’invention de la photographie, la peinture n’était plus tenue de documenter la réalité et par conséquent, de la décrire, on commença à utiliser des couleurs comme s’ils étaient de notes, ou de la musique qui est la manifestation la plus abstraite dans l’absolu, entre les formes d’expressions humaines. Il proclame que probablement les Phéniciens, commerçant avant tout, avaient l’intuition d’une telle vérité…
 
Et selon l’archéologue Hareth Boustany : « A l’époque où les plus riches hommes d’affaires phéniciens se démenaient, Hérodote, Platon, Pythagore, Aristote, qui parlèrent aussi longuement de la mystérieuse importance de la couleur n’avaient pas encore émis leurs premiers vagissements, n’étaient pas encore nés.
 
Pline et Sénèque écriront plus tard des études sur la pourpre dans Naturalis Historia et dans Naturalium Quaestionium. C’est de là que devait venir les recherches de Leonardo da Vinci qui essaya de trouver la corrélation, dans l’enthousiasme d’une catalogation empirique, entre les éléments naturels et l’échelle chromatique. Les inventions de Newton sur la décomposition en couleurs de la lumière blanche étaient dans l’embryon de l’histoire future. Les théorisations de Wagner sur le rapport entre le chromatisme et expressions musicales n’existaient pas encore…. ».
 
La pourpre de Tyr vivement appréciée, était extraite d’un mollusque secrétant cette matière colorante d’un rouge foncé violacé. Cette extraction, quoique laborieuse, avait rendu les Phéniciens célèbres tout autour du bassin méditerranéen et bien loin encore… Ce Mollusque n’est autre que le Murex Brandaris.
 
Relatons ce que le psychanalyste Cesare Musatti déduit de l’influence émotive exercée par la teinture rouge violacée, quelques millénaires av. J.-C. De ses commentaires : « Oublions de vivre dans ce monde où nous faisons tout, jusqu’aux rêves même, plongés dans le technicolor ? Oublions … les films en couleurs, les défilés de mode fantasmagoriques,… Oublions les tableaux de Giotto… (par contre,) comment ne pas croire que les piles d’étoffe couleur pourpre, quand elle apparaît sur une plage du nord de l’Afrique, ou sur un quai italien, espagnol, français, britannique, apportées par les Phéniciens, ne suscitent pas une émotion chimérique, une velléité incontrôlée de possession, une fantaisie défendue? »
 
Cet art exquis occupait une partie considérable dans la puissance économique de ce peuple noble, vertueux et royal de race.
 
Puis le psychanalyste ajouta : « Ils basaient… cette certitude sur l’une de leurs recherches maîtresses, sur quelque technique de marketing mise en chantier avant la lettre… ».
 
Pline a longuement fait les louanges de ces mollusques en décrivant la vie de ces poissons appelés pourpre qui vivent sept ans, tout au plus et qui se cachent comme le murex quand naît la canicule ; en demeurant cachés trente jours, ils se groupent ensemble au printemps et en se frottant l’un à l’autre, ils secrètent une salive tenace semblable à la cire.
 
Et il ajouta que les murex en font de même, néanmoins, ceux à pourpre ont cette fleur de la couleur recherchée pour teindre les tissus, au milieu du canal de la gorge. C’est là dans cette veine candide, comme il dit, que se situe une quantité de liquide, dans laquelle prend naissance cette belle et si précieuse couleur de rose qui reluit en penchant vers le noir….
 
Les tissus en pourpre sont l’apanage des notables, des grands fonctionnaires, des rois, des riches uniquement… (Esther 8 ; 2), (Daniel 5 ; 7), (Luc 16 ; 19), (Juges 8 ; 26) ; Dans la bible où la pourpre est bien citée.
 
Le Pourpre dans l’histoire par Hareth Boustany :
 
« Les tissus teintés de couleur pourpre par les Phéniciens ont tôt fait connaître une vogue sans pareille dans tous les pays environnants. Les notables de l’Egypte du temps de Ramsès II (1300 – 1234 av. J. _C. enveloppaient leurs morts dans des linceuls de couleur pourpre. Les plus beaux cadeaux de Ramsès III aux dieux étaient les étoffes pourpres.
 
Homère raconte qu’Achille, ayant invité Priam à dormir chez lui, fit tendre la couche de draps pourpres. Quand les Troyens voulurent ensevelir les restes d’Hector, ils le firent dans une urne d’argent qu’ils enveloppèrent de pourpre. Homère raconte aussi que les draps de pourpre étaient devant Agememnon rentrant de la guerre de Troie. Les Hébreux connurent la pourpre en Egypte et ils passèrent maîtres dans le rapiéçage des tissus.
 
Les notables d’Egypte, de Babylone et d’Assour portèrent des tissus pourpres.
Assoubanipal s’enorgueillit dans une de ses tablettes cunéiformes d’avoir imposé aux rois de Tyr, de Sidon, d’Arwad et de Jbeil le paiement d’une taxe en pourpres.
 
Quand Alexandre le Grand (356 – 323 av. J.-C.) occupa la ville de Suse, il y trouva des tissus pourpres datant de 190 ans et dont la valeur était inestimable. Car le roi de perse portait les habits de couleur pourpre et en avaient interdit l’usage à toute la population. Alexandre le grand s’est fait accompagner par des teinturiers phéniciens qui alimentaient régulièrement en tissus les femmes de la cour du Macédoine.
 
A l’époque romaine, les tissus pourpres connurent une grande diffusion, surtout parmi les femmes, malgré leurs prix très élevés-.
 
C’est ainsi que Jules César (100 – 44 av. J.-C.) conseilla de restreindre l’utilisation de ces tissus. Et après lui, l’empereur Auguste ne permit plus le port de ces tissus pourpres qu’aux sénateurs et fit de la fabrication de cette teinte un monopole d’état…
 
…Ainsi les juifs voulurent se moquer du Christ « roi des Juifs », ils jetèrent sur ses épaules une tunique teinte en pourpre (Marc 15 ; 17)…
 
… Et tout comme Byzance, la Rome chrétienne se mit à la pourpre, surtout en ce qui concerne les habits des cardinaux… »
Hareth Boustany