Les phéniciens
 
La Musique Phénicienne

 

Les Phéniciens passèrent de Canaan à Israël non seulement la liturgie, les coutumes et une partie de la langue, mais également toutes sortes d’instruments de bois de cyprès : comme des psaltérions, des cithares, des sistres, des tympanons et des cymbales, entre autres… et avec lesquels « David et toute la maison d’Israël jouaient devant l’Eternel » (2, Samuel, 6 :5)…
 
Nous ne pouvons qu’admirer les files des danseuses pleureuses qui sont affichés sur le sarcophage phénicien de Ahiram, de Byblos, datant du XIIIe siècle avant J. –C.
 
Par ailleurs, la célèbre cité de Byblos noua d’intime relations avec les égyptiens. Les phéniciens leur passèrent les luths, les harpes, et bien particulièrement celles de taille gigantesque plus grandes que celle des humains. Elles sont appelés par les phéniciens « Kinnor » et étaient réservée aux prêtres qui jouaient parfois à genoux…
 
D’un autre côté, par l’intermédiaire des Phéniciens sont transmis les flûtes recourbées, figurant dans les peintures égyptiennes les plus récentes. Ils « voisinent avec les deux types traditionnels de flûte - à bec et à traverse - munies de cinq trous seulement : ce qui fait penser à une échelle de cinq ou de sept tons que les Egyptiens (et les Phéniciens avec eux) auraient utilisée, comme fondement de leur pratique musicale… (Hareth Boustany).
 
La Musique et Pythagore :
 
Atomisme et Pythagorisme Phéniciens aux Origines des Théories et des Notations de la Musique :
 
Vue de Phénicie, la vie de Pythagore offre des éléments qui éclairent les théories et les notions de la musique dans leurs relations étroites avec la religion et la science. Comme les biographies pythagoriciennes comportent un synchronisme avec Thalès, ces éléments – les uns et les autres mal connus – sont pris sur le fait à la fin du VIIe siècle.
 
L’une des traditions conservées par Jamblique (De Pythagorica, 7) rapporte que Pythagore est né à Sidon. D’après Cléanthe, cité de Porphyre de Tyr, le père de Pythagore, Mnésarhos, est tyrien (De Pythagorica vita 1).
 
Thalès fut l’un des nombreux maîtres de Pythagore (Jamblique, 11 – 13). Fondateur de l’école de Milet, Thalès est, lui aussi, d’origine phénicienne (Hérodote, I, 170). Diogène Laërce (I, 22) rapporte également qu’au témoignage d’Hérodote, de Douris, de Démocrite et de Platon, Thalès appartenait aux Thélides, noble maison qui descendait de Cadmos et d’Agénor.
 
Après un séjour à Samos auprès de Thalès, Pythagore se rend à Sidon pour y rencontrer les descendants du physiologue et prophète, Mÿkhos de Sidon (Jamblique, 14), qui aurait vécu antérieurement à la guerre de Troie. Or c’est à Mÿkhos de Sidon que Poseidonios attribue la théorie de l’atome (Strabon XVI, p. 757). D’autres l’imputent à Leucipe (vers 500 av. J. –C.), le maître de Démocrite. Démocrite pousse la théorie très loin.
 
On peut poser que le pythagorisme est introduit en Phénicie au moment où Pythagore est censé naître à Sidon. Depuis un demi millénaire, une autre religion, l’atomisme, le précède. Tout en étant antithétiques, ces deux grandes philosophies religieuses se complétaient avant que Platon et Aristote ne les opposassent. Elles fleurissent donc quelques cent cinquante ans avant le siècle de Périclès.
 
Avec l’opposition de Platon, inévitablement les pistes furent brouillées. Toutefois, la rencontre de Pythagore et des descendants de Mÿkhos est très vraisemblable : la science grecque au Vie siècle en porte les traces, notamment l’école éléatique, dont Xénophane de Colophon passe pour le fondateur (Diogène Laërce, IX, 2, 20).
 
Le Pythagore né à Sidon a pour mère une vierge (Parthenis). Il est annoncé par l’oracle de Delphos, comme le fils d’Apollon ; il est Apollon, lui-même (Jamblique, 5 ; 7 ; 65 ; 77 ; 133). Or, Apollon est le Dieu-soleil qui préside à l’harmonie céleste. On ne s’étonnera pas, dans ces conditions, que Pythagore-Apollon ait été seul à entendre « dans son ensemble l’harmonie et le concert des sphères et des astres qui roulent avec elles » (Jamblique, 65).
 
Un double problème surgit. Le mouvement du son est-il analogue au mouvement astronomique de la musique des sphères ? Le mouvement de son est-il analogue à celui de l’atome ?
 
En musique il y a deux sortes de mouvements : celui de la mélodie, ou évolution mélodique d’un son à autre ; et celui du son lui-même, qui résulte des vibrations.
 
Si l’on se place du point de vue de la musique des sphères, imagée par Apollon Hegemon, auquel on attribue la corde centrale (mèse), nous nous trouvons en présence d’un système musical, d’une harmonie globale, où l’ordre des sons, de même que leurs intervalles, en rapport avec la division du temps et la tension de la course, est contraignant, absolument.
 
Dans ce système, qui donc se permettrait de perturber l’ordre du ciel ? N’est-ce pas cette interdiction que nous lisons chez Platon :
 
« On ne saurait toucher aux tropes de la musique sans toucher aux principales lois politiques, comme le dit Damon et comme j’en suis persuadé. » (République, 424c.) et chez Plutarque :
 
« Les Argiens avaient même institué un châtiment pour toute dérogation aux lois de la musique… » (De musica, c. 37)
 
On peut donc poser que, dans cette musique, le son ne résulte pas d’un choc. Or, le choc est l’un des principes de la philosophie atomistique.
 
Dans un vieil akousma pythagoricien nous lisons :
 
« Qu’est-ce que l’oracle de Delphes ? C’est la tetraktys, c’est-à-dire l’harmonie, dans laquelle il y a les sirènes. » Jamblique, 82).
 
Dans cette musique des sphères, le son n’a donc pas de mouvement propre. Il est mû ; il n’y a pas de choc ; donc le son est la voix d’une sirène. Inversement, le mouvement mélodique est obligé ; c’est celui du cosmos, d’Orient et d’Occident ; du soleil-Pythagore qui naît à Sidon et meurt à Métaponte. Pour cette harmonie, il n’est pas besoin de notation.
 
Tous ces progrès, aux origines de la science occidentale, semblent bien être issus de la rencontre de Pythagore et des descendants de Mÿkhos de Sidon, quelque cent cinquante ans avant le « Siècle des Lumières » de la Grèce…
   Extrait de l’ouvrage intitulé : « Le livre et le Liban », par Denise Jourdan –